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21 juin, 2017

4 mythes sur les privatisations

Les privatisations, lorsqu’elles sont bien exécutées, bénéficient grandement à la société. Voilà pourquoi.
Lorsqu’on entend parler de privatisations d’entreprises d’État, c’est souvent pour évoquer celles qui tournent mal et n’apportent pas les bienfaits escomptés. Cependant, ces cas sont-ils généralisables ?
Je suis récemment tombé sur une étude intéressante publiée par la Banque Mondiale en 2004 et rédigée par Sunita Kikeri et John Nellis. Ce rapport, intitulé « An Assessment of Privatization », constitue en fait une sorte de méta-analyse d’une panoplie d’études (74) ayant étudié les impacts des privatisations d’entreprises d’État à travers le monde.

DES MYTHES ASSOCIÉS À LA PRIVATISATION

Les auteurs traitent de plusieurs mythes associés aux privatisations :
– Les bienfaits économiques proviennent simplement d’une exposition à la concurrence plutôt que du changement de propriétaire.
– Elles entraînent des mises à pied ayant un effet négatif sur le marché du travail.
– La majorité des bienfaits économiques finissent dans les poches d’une poignée de d’individus (actionnaires, gestionnaires, investisseurs étrangers, oligarques connectés à l’élite politique).
– Elles n’aboutissent pas à une amélioration de la richesse au plan sociétal (welfare), l’amélioration de la performance ne provenant que des licenciements et des hausses de tarifs.

LE PIC DES PRIVATISATIONS DES ANNÉES 90

Le pic de privatisations est survenu vers la fin des années 1990, soit entre 1996 et 1999. La chute du communisme, la crise asiatique de 1997 et en Amérique Latine furent des catalyseurs, tout comme la libéralisation graduelle de la Chine.
De nombreuses études portant sur un large éventail de pays concluent sans équivoque que la privatisation améliore significativement la performance économique des entreprises, que ce soit en termes de volumes produits, de productivité, de rentabilité et de niveau d’investissement. Les données empiriques confirment qu’entre les mains d’entrepreneurs privés, ces entreprises font mieux.
Mais est-ce que cela ne fait qu’enrichir les actionnaires aux dépens de la société, qui subit des licenciements et doit ensuite payer des tarifs plus élevés ?

RÉDUIRE LE GASPILLAGE POLITIQUE

Parmi les bienfaits sociétaux des privatisations, il y a d’abord une réduction du gaspillage engendrée par des politiques de prix plus rationnelles. On constate aussi parfois des réductions de tarifs résultant d’une amélioration de la productivité de l’entreprise.
L’amélioration de la productivité autorise aussi souvent des salaires plus élevés, tout comme les investissements en technologies nécessitant de la formation de main d’oeuvre. Les études constatent d’ailleurs que les privatisations ne sont pas une cause de chômage significative dans les pays concernés.
Mais l’un des principaux impacts positifs est une hausse des investissements (financés par les gains de rentabilité), lesquels créent des emplois et améliorent l’accès aux services (en quantité et qualité), ce qui bénéficie particulièrement aux plus pauvres qui étaient mal servis par l’entreprise d’État. À quoi bon avoir un aqueduc à faibles tarifs si l’eau ne dessert pas votre village ?

RÉDUIRE LA DETTE ET AUGMENTER LES RECETTES FISCALES

Finalement, il ne faut pas oublier que les fruits de ces ventes d’entreprises d’État permettent aux gouvernements de réduire leur dette et d’augmenter leurs recettes fiscales futures (grâce à la meilleure rentabilité encore une fois). Il y a cependant un risque que cette marge de manœuvre soit dilapidée en dépenses futiles ou encore subtilisée par la corruption des dirigeants politiques et fonctionnaires.
Donc, pour que ces gains se matérialisent, il faut un contexte institutionnel adéquat, ce qui nécessite souvent des réformes. C’est la qualité des institutions qui permet d’éviter des ventes qui ne font qu’offrir ces entreprises en cadeaux à une poignée d’oligarques grâce à l’aide de politiciens corrompus.

AMÉLIORER LES PERFORMANCES ÉCONOMIQUES

Par ailleurs, les études tendent à démontrer que le transfert de propriété du public au privé est une condition importante, voire indispensable, à la réalisation des gains de performance économique. De simples réformes ne peuvent pas, à elles seules, y parvenir, il faut véritablement une privatisation de l’entreprise.
Concernant l’industrie bancaire, les auteurs indiquent que la privatisation est primordiale. Les banques d’État ont engendré des ratios de pertes très élevés tout en exigeant des taux d’intérêt plus élevés, et en concentrant le risque de crédit au sein d’entreprises d’État inefficientes. L’existence de banques détenues par l’État n’est définitivement pas souhaitable selon les expériences passées de divers pays.
Pas moins de 74 études ont été concernées par cette méta-analyse, autorisant donc à considérer qu’elle représente bien l’état des connaissances sur le sujet, du moins en 2004, soit tout de suite après une vague imposante de privatisations survenues un peu partout dans le monde.

BIENFAITS DIFFUS, COÛTS CONCENTRÉS

L’une des raisons rendant les privatisations si impopulaires est que leurs bienfaits sont diffus alors que leurs coûts sont concentrés ; même si les bienfaits excèdent largement les coûts, les plus bruyants sont ceux qui sont perdants au change.
Ce pourquoi il est important de rappeler que les privatisations, bien exécutées, bénéficient grandement à la société.
Les auteurs terminent par quelques recommandations à l’égard des privatisations :
– Protéger un contexte de concurrence
– Créer un système de régulation avant la privatisation
– Assurer la transparence du processus de vente
– Développer un certain filet social pour ceux qui perdront leur emploi ou subiront des tarifs augmentés.
Ces mesures permettraient selon eux de capturer les bienfaits des privatisations tout en favorisant leur acceptation sociale.
Comme vous le savez, je suis très suspicieux lorsqu’il est question de la Banque Mondiale et du FMI. Cependant, dans le cas de cette méta-analyse, une seule des 74 études a été publiée par la Banque Mondiale, les autres proviennent de chercheurs universitaires dispersés à travers le monde. Je ne crois donc pas que cette analyse devrait être rejetée simplement parce qu’elle provient de la Banque Mondiale.

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