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02 février, 2009

Crise économique? Ou crise de la science économique?

André Dorais

L’immense majorité des politiciens, des médias et des économistes croient que la consommation est le moteur de l’économie. Ils croient également que les consommateurs ne dépensent plus parce qu’ils ont été échaudés par les méchants capitalistes. Ils concluent que l’État doit prendre la relève des consommateurs pour la relancer. Autrement dit, les politiciens doivent se résigner à dépenser davantage l’argent des contribuables. Pauvres politiciens! Ce doit être vraiment difficile pour eux!

Pour annoncer cette nouvelle, ils se font voir et entendre partout sous le prétexte de rassurer la population. Ils y sont encouragés non seulement par des groupes d’intérêt, mais par des économistes, financiers et autres experts qui ne comprennent rien au capitalisme et à l’économie. Si ces décisions insensées relèvent uniquement des politiciens, on ne peut pas leur attribuer tout le blâme puisqu’ils sont induits en erreur par des experts perdus, des experts qui ont le titre ou l’autorité de la connaissance, mais non la connaissance elle-même.

Comment la population ne pourrait pas avoir peur lorsque les politiciens se font passer pour des sauveurs de l’humanité et que la majorité des experts affirment que l’État est seul capable de la sauver? Heureusement, il existe une façon plus rationnelle de voir le monde. Elle fait certainement aussi peur que celle promue par la majorité des experts, mais pour des raisons différentes. La peur engendrée par la première est fondée sur une incompréhension de l’économie et du politique, tandis que celle engendrée par la seconde est due à ce qu’elle bouscule l’ordre établi.

La consommation n’est pas le moteur de l’économie

L’idée que la consommation constitue le moteur de l’économie provient d’un concept erroné pour la décrire. Le PIB, ou «produit intérieur brut», constitue, selon la majorité des économistes, et conséquemment des médias et des politiciens, une façon adéquate de décrire la «santé» économique. C’est faux pour plusieurs raisons.

Selon la formule keynésienne et soi-disant scientifique de la richesse, dès lors que les consommateurs dépensent moins, les gouvernements doivent prendre la relève pour continuer à «faire rouler» l’économie. Ils considèrent que les dépenses gouvernementales sont parfaitement substituables aux dépenses des consommateurs.

PIB=C+I+G+X-M

C : dépenses effectuées par les consommateurs
I : dépenses consacrées à l’investissement
G : dépenses effectuées par les gouvernements
X : dépenses relatives aux exportations
M : dépenses relatives aux importations

Les dépenses gouvernementales, que les politiciens présentent toujours comme étant des investissements, question de faire plus sérieux, ne sont en réalité rien d’autres que des dépenses de consommation effectuées par eux, mais avec l’argent des contribuables. Ce sont les choix de consommation des politiciens présentés comme étant ceux de la collectivité. Ces dépenses bénéficient à certains individus, mais au détriment des autres. Pire, elles réduisent la véritable richesse puisqu’elles substituent les choix des politiciens à ceux qu’ils prétendent représenter.

Il ne suffit pas de dire que certaines dépenses gouvernementales bénéficient à un grand nombre d’individus pour les justifier puisqu’elles se fondent sur une violation des libertés individuelles. Lorsqu’un gouvernement monopolise les routes et les canalisations souterraines, il peut dire que leur rénovation va bénéficier à la population, mais il est moins sûr que celle-ci lui confierait cette tâche si elle en avait le choix. Il ne suffit pas de dire que le gouvernement dépense dans ses infrastructures pour que cela bénéficie à tout le monde. Que le PIB augmente suite à ses dépenses ne signifie pas que les individus s’en trouvent plus riches.

Parmi les dépenses annoncées pour les infrastructures, plusieurs sont consacrées à la rénovation de parcs et d’arénas que personne ne visite, à la construction de ponts que personne ne demande, à l’embauche d’individus pour regarder passer le temps, etc. Il y a également beaucoup de dépenses annoncées pour satisfaire ceux qui chialent tout le temps, question de les faire taire un bout de temps. Pour ajouter l’injure à l’injustice, on présente ces dépenses comme étant empreintes de compassion. Grande morale! Grande science!

Les gouvernements ne cherchent pas la rentabilité de leur consommation, mais à réduire le moins possible le PIB sous le prétexte de maintenir la richesse. Ils imposent leurs choix sous le prétexte que les individus sont incapables d’en effectuer d’intelligents. Les libertés s’effritent à chaque crise économique sous le prétexte de la corriger.

Selon la définition algébrique du PIB, les dépenses des consommateurs sont considérées comme les plus importantes. Bien qu’elles varient d’un pays à l’autre, on peut se contenter de dire qu’elles constituent environ les deux tiers du PIB, d’où l’expression de «moteur» de l’économie. Les dépenses gouvernementales constituent environ 20% du PIB, les investissements, 14%, tandis que celles consacrées aux importations et aux exportations tendent à s’annuler mutuellement. À en juger par la proportion attribuée aux exportations nettes, les gouvernements perdent leur temps à essayer de les préserver, ce qui est vrai, mais non pas à cause de cette statistique. C’est plutôt parce qu’on s’enrichit autant à importer biens et services qu’à les exporter.

Les dépenses d’investissement qui se retrouvent dans le calcul du PIB ont une définition non seulement restrictive, mais invraisemblable. On y inclut l’achat de maisons neuves, alors qu’une maison est un bien de consommation qui a la particularité de durer longtemps. On y inclut les variations des inventaires des entreprises sans réaliser qu’ils ont tendance à augmenter en période de ralentissement économique. Qu’à cela ne tienne, des stocks de produits invendus ont un effet positif sur l’«investissement»! Il y a pire.

Parmi ces dépenses d’investissement, c’est-à-dire de production, on inclut les dépenses des entreprises pour la construction de bâtiments nécessaires à leur fonctionnement et les dépenses relatives à l’équipement, mais tout en excluant l’équipement qui sert à produire les biens de consommation. Si les dépenses effectuées pour la construction de bâtiments sont bien classées sous cette rubrique, et elles le sont, alors toutes les dépenses d’équipement servant à la production de biens de consommation ne le sont pas. Le bâtiment, comme l’équipement, sert à la production de biens de consommation, par conséquent si l’on inclut les dépenses relatives à l’un, on doit inclure les dépenses relatives à l’autre.

On exclut, à tort, les dépenses relatives à l’équipement, par conséquent à la production, sous le prétexte qu’elles se retrouvent dans les prix des biens de consommation et que les inclure reviendrait à calculer deux fois ou plus les mêmes dépenses. C’est là une des plus graves erreurs relatives au concept du PIB. Les dépenses de production ne sont pas inclues dans les dépenses de consommation puisque celles-ci ne comptent qu’elles-mêmes. Un exemple succinct permet de le réaliser.

Disons qu’un pain est composé de deux éléments, blé et farine, et que trois travailleurs sont nécessaires à sa production : un fermier, un meunier et un boulanger. Le fermier produit pour 1,50$ de blé, soit 1,50$ en valeur ajoutée si l’on exclut le prix des graines. Le meunier produit pour 2,50$ de farine, soit 1,50$ pour le blé du fermier et une valeur ajoutée de 1$ pour sa propre production. Le boulanger produit un pain pour 3,00$, soit 2,50$ pour la farine du meunier et 0,50$ en valeur ajoutée. Leurs dépenses respectives sont 0$, 1,50$, et 2,50$. La totalité de ces dépenses de production est de 4$ et elle n’est pas inclue dans le prix du pain de 3$, seules les valeurs ajoutées le sont. (Pour un exemple détaillé, voir The Value of 'Final Products' Counts Only Itself, de George Reisman)

Si l’on tient mordicus à se faire une idée de la richesse à partir des dépenses, on doit absolument inclure les dépenses de production actuellement exclues. La vaste majorité des économistes ont raison de dire que les dépenses de consommation égalent les valeurs ajoutées à chaque niveau de production, mais ils ont tort d’affirmer que les dépenses de production soient inclues dans les dépenses de consommation. Par conséquent, ils ont tort de dire que les dépenses de consommation constituent le moteur de l’économie puisque les dépenses de production sont plus importantes qu’elles. Il s’ensuit également que les gouvernements ne devraient pas encourager la consommation au détriment de la production, encore moins soutirer l’épargne des contribuables sous le prétexte de relancer la consommation à leur place.

Le PIB ne représente pas la richesse

Dès lors qu’on utilise le PIB comme représentant de la richesse, les politiciens peuvent dépenser autant qu’ils le veulent et se faire passer pour des sauveurs de l’humanité. Par contre, si l’on dissocie le PIB de la véritable richesse, soit celle définie par chaque individu, alors l’autorité, aussi bien politique qu’économique, doit, à tout le moins, descendre de son piédestal puisqu’elle contribue à l’appauvrissement de la population. En effet, lorsque les gouvernements dépensent sur n’importe quoi, le PIB peut augmenter un bout de temps, mais certainement pas la richesse puisque les individus se retrouvent avec moins de ressources et conséquemment moins de choix. Or, la liberté d’effectuer ses propres choix, plutôt que de se faire imposer ceux des gouvernements, constitue l’essence même de la richesse.

À quoi sert d’avoir de l’argent si ce sont les gouvernements qui décident comment il doit être dépensé? Le but principal d’en avoir n’est-il pas justement de décider soi-même comment le dépenser? Seule cette liberté de disposer soi-même de sa propriété permet de combler ses besoins, soit d’être riche. Malheureusement, c’est également celle qui est la plus bafouée par les gouvernements. Ils se l’arrogent sous le prétexte de parler au nom de la collectivité et d’imposer un minimum de solidarité. C’est de la morale à cinq sous, de la politique.

La richesse d’une nation ne se mesure pas, elle dépend de l’évaluation de chaque individu. Elle ne se mesure pas plus à l’argent qu’on possède ou qu’on dépense. Certes, plus un individu a de l’argent, plus il a de choix, mais ce n’est pas uniquement l’argent qu’il possède ou qu’il a dépensé qui détermine sa richesse. L’argent dépensé pour un objet ou un service quelconque peut être considéré excessif pour un individu et minime pour un autre et cela nonobstant leur richesse respective.

En d’autres mots, le jugement qu’on porte relativement à l’argent dépensé pour un objet quelconque ne varie pas seulement en fonction de l’argent qu’on possède, mais aussi selon l’utilité qu’on attribue à cet objet, produit ou service. Un service à prix unique n’a pas la même valeur pour tout le monde, peu importe que les individus soient aussi riches monétairement les uns que les autres. Il s’ensuit qu’additionner l’argent dépensé par les individus, entreprises et gouvernements ne peut d’aucune manière rendre compte d’une richesse collective, ou pour utiliser le terme consacré, d’une croissance économique.

Les politiciens ne sont pas plus aptes que les autres à déterminer les besoins de chacun, mais puisqu’on est incapable de s’imaginer un monde sans eux, ils continueront à ruiner les populations sous le prétexte de les sauver. Ils continueront à les ruiner avec l’appui d’intellectuels à la solde de l’État, avec l’appui notamment d’économistes en titre seulement qui croient faire de la science sous le prétexte d’utiliser des formules mathématiques bidons : PIB=C+I+G+X-M ; MV=PQ ; M=1/(1-MPC), etc.

On ne devient pas scientifique du seul fait d’utiliser des mathématiques et des statistiques pour décrire l’objet de sa recherche. Au-delà de savoir les utiliser, ce qui est douteux pour plusieurs économistes, on doit se demander si elles sont utiles à l’objet de ses recherches. La science économique moderne a commencé à utiliser les mathématiques sous le prétexte de se rendre plus scientifique, plus pure, plus à l’image de la physique qui faisait des ravages au début du dernier siècle. Ce faisant, elle ne s’est pas rapprochée de la science pure, elle s’est éloignée de la science, point.

La science économique s’est éloignée de son objet de recherche, soit l’action humaine qui vise un but, notamment dans un contexte d’échange monétaire, pour chercher des formules mathématiques en lien avec l’économie. Ces formules sont pratiquement toutes fausses, c’est-à-dire qu’elles décrivent mal la réalité puisqu’il y a trop de variables et trop peu de constantes pour la décrire correctement. On a une idée du résultat de l’utilisation de ces outils de raisonnement avec le PIB qui passe pour de la richesse. L’individu est oublié, voire écrasé, au profit d’une collectivité sans âme.

Un autre problème important du PIB, voire de la science économique telle qu’elle est enseignée à l’heure actuelle, est de confondre les ressources et l’argent, de croire que l’argent injecté par les gouvernements dans l’économie contribue à la richesse. C’est non seulement faux, cela contribue à l’appauvrissement de la majorité. (Pour plus de détails à ce sujet, voir Les statistiques ne font pas la science et la monnaie, la richesse) C’est dire à la fois l’importance et les dangers de la science économique.

La science économique, telle qu’enseignée aujourd’hui, souffre d’une dépendance à l’État. Elle n’est pas «dure» parce qu’elle utilise des mathématiques, mais parce qu’elle fait de plus en plus appel à l’État pour résoudre les problèmes qui la confrontent. Malheureusement, c’est le lot de la plupart des sciences humaines. Les experts des sciences «dures» qui s’aventurent à discuter économie n’ont pas à pavoiser pour autant puisqu’ils sont aussi prompts que les autres à revendiquer la coercition de l’État. À cet égard, leur esprit est encore «mou». La rigueur intellectuelle n’appartient pas à l’outil de travail, mais à la cohérence et sa capacité à décrire correctement l’objet de sa recherche.

Une science humaine sera «dure», au sens de rigoureuse, lorsqu’elle ne revendiquera plus la coercition pour arriver à ses fins. Voilà un pas qui risque d’être difficile à franchir en grand nombre, mais si les politiciens, économistes, et autres experts conduisent les gens à une deuxième Grande Dépression en moins de cent ans, il devrait y en avoir davantage à y songer sérieusement. Qu’on se le tienne pour dit!

Il y a crise économique parce qu’il y a méconnaissance de l’économie, des processus d’échange et de création de richesse. À son tour, cette méconnaissance s’inscrit dans une croyance aveugle au politique et à l’État. Si ce n’était qu’ignorance, ce serait sans conséquence, malheureusement on est contraint d’y contribuer, par sa vie ou ses poches. Les croyants en la politique sont comme les croyants en la religion d’une certaine époque. Dès lors que vous leur apportez une explication plus rationnelle du monde, qui, de plus, leur serait bénéfique, ils vous menacent de représailles. Il s’ensuit que de tous les croyants, je préfère ceux qui croient encore au père Noël.

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